lundi 24 mars 2014

Un peu de buée sur la vitre, un nuage qui a la forme d'un oiseau, le soir vient et tu écoutes ce qui monte en toi. Ce n'est ni angoisse, ni tristesse. Oui encore une fois, c'est un murmure qui ne prétend à rien, une sorte de silence qui prolonge sa caresse. Tout est simple, tout peut être simple. Le soir a cette couleur d'un repos qui se prépare. Les voix au loin paraissent plus claires. Avant le passage de la nuit, il y a le regard du soir. Les visages ont perdu leur fardeau. C'est bon de vivre avec cette douceur. L'autre, avec la lumière qui s'efface, retrouve tout son mystère. On peut même deviner une larme avant qu'elle ne coule. On marche avec l'ombre dans un regard. On pose la main sur cette obscurité comme pour dire : "cela passera, cela va aller ! Regarde là-bas, il y a des sourires qui ont un accent de vérité !"
Tout peut être simple, tu peut prendre du temps avec un enfant, être tout à lui. Tu deviens pour lui le doux manteau de laine qui ôte l'effroi. Tu peux prendre son visage entre tes mains et y allumer une danse. Tu peux écouter sa parole-ruisseau qui voit l'orée où il fera bon rejoindre la mer. Tu peux prendre un livre, en goûter une page comme on goûte une cuillère de miel de sapin. Tu peux être là à ta fenêtre qui devient bleue de nuit !. Il n'y a plus rien qui tranche la densité d'un moment où tu es toi, simplement toi, sans ajouts et sans effort, libre comme un vagabond qu'on ignore ! C'est comme si soudain il n'y avait plus un mot en trop, ou des gestes superflus. Tu glisse avec le temps qui est devenu ami. Plus de cris ! Plus rien ne te heurte ! Fini les trébuchements !. Tu glisse tu ne sais où ! Tu t'enfonces là où tout s'élargit, là où tout redevient vivant. Avec la nuit les fenêtres deviennent comme des feux de camp qui ouvrent d'autres espaces. Qu'est-ce qui brille comme cela autour des lampes ? C'est comme si tu avais tout d'un coup le pouvoir de comprendre chaque être dans le lointain, là, ce soir, dans ces pièces dont tu ne distingues  que la lumière. Là-bas, la vie aussi ! Là-bas, une femme triste cherche un refuge sous les draps ! Là-bas un homme est au bord de ce qu'il n'arrive pas à dire ! Et plus loin encore, un enfant dessine une maison un peu ronde accueillant le soleil qui sourit !


samedi 15 mars 2014

Eloignement, comme un départ, tu quittes immobile ce qui n'était pas, du sable, rien ! Tu es à ta fenêtre avec le jour qui ne veut pas se lever, et le chant d'un oiseau qui se répète, qui se répète ! Deux colombes passent, cherchent un gîte. Légère bruine, paysage en pleurs après le trop fort soleil d'hier ! Tu consens à cela. Passera aussi par là le vol fragile d'un oiseau ! Ta maison est calme. Elle vogue dans sa patience à elle. Elle prend avec ses murs et ses parquets tous les moments du temps. Elle se dispose à être maison pour accueillir un être humain et sa poussière. Tu as vécu, tu vivras, et entre les deux des petits riens forment un chemin, remettre une pince à l'atelier, éplucher les choux de Bruxelles qui jaunissaient ! Tout est tombé. Tu vois clair. Une grande clarté qu'aucun nuage ne peut envahir ! Les quelques arbres que tu aperçois au loin sont devenus des frères. Ils sont juste à leurs places d'arbres. Ils n'ont pas à faire d'efforts pour se couvrir de feuilles et de fleurs. Tu vis ce que tu as à vivre, comme on laisse partir un enfant vers son océan. Toi, tu donnes seulement une caresse à ton jour. Tu regardes ce qu'il t'offre comme on ouvre une caisse oubliée dans un grenier.Tu prends soin de tes moments comme tu prenais soin de ceux qui maintenant n'ont plus besoin de toi. Tu es là, jardinier de ta terre quotidienne. Tu ne refuses pas cette odeur un peu âcre. Tu égrènes ton réel, tu tamises doucement la vie que tu aimes !





jeudi 13 mars 2014

S'établir nomade, chérir cette marche, ce déplacement, cette traversée, être dans ce mouvement même de l'arbre qui se couvre de chatons, respire à sa manière les effluves du soleil, voilà où tu en es, comme si avec ton cri, tu élargissais les contours d'une bouche emplie d'ombres qui font mal !Ce matin, les primevères étaient le seul poème. Au centre de leurs corolles, il y avait de quoi disparaître, se taire à jamais !
Dans ce que tu veux prendre, dans ce que tu veux saisir, là-bas, derrière la colline, derrière ton espace à toi, il n'y a rien. Quitte l'espoir d'un giron qui effaceraient tes lézardes ! Tu ne voyais pas la joie qu'il y a d'entrer en relation avec un autre être, ou l'écorce d'un arbre, et même une pierre, ou un verre à moitié plein qui capte les éclats de la lumière. Aveuglé par ce qui a manqué, ton chant ne trouvait pas son chemin, séduit par des sirènes au même visage ! Tu ne quitteras jamais ce monde ! Il est en toi ! Tu es nomade entre deux interrogations lancinantes. Tu chevauches le vent ou le vent te chevauche. Tu le suis comme la sterne, ailes immobiles, qui se laisse happer par le courant de l'air au bord de la falaise. Ton regard devient caresse pour que se tisse la tunique d'un songe qui n'est pas une illusion. Tu écoutes au bord des jardins, près de l'or des jonquilles, ou de la blancheur des pâquerettes, un peu rosie par un sang inconnu. Tu écoutes l'enfant muet, fier comme artaban, sur son vélo qui a des ailes ! Tu écoutes ce murmure déjà plus loin que les sourires forcés des candidats aux municipales ! Tu écoutes un battement de coeur tout proche, mouvement, mouvement, le tic-tac d'une horloge qui n'est plus là pour l'heure, mais qui avance ! Tu écoutes un visage qui passe à ton côté, qui devient une flamme, ne te quitte pas ! Tu écoutes le paysage vacillant du soir encore couvert de paillettes d'or du grand soleil d'aujourd'hui ! Ton espérance n'est plus une idée que l'on brandit, mais ta respiration même, une inspiration , une expiration qui accompagnent un élargissement ! Atteindre est un verbe qui s'est brisé pour toi. Accueillir te reste comme un fleur offerte que tu ne veux pas voir faner ! C'est tout et c'est toi avec des mots qui ne trompent pas !


lundi 10 mars 2014

Dans ce silence, je n'ai plus de mots. A peine suis-je un oiseau qui lisse ses ailes et contemple le déclin du soleil ! Qu'est-ce qui s'ouvre, qu'est-ce qui apparaît ? Oh ! Lueur qui ne se comprend pas, qui empoigne les profondeurs de l'être, là où plus rien ne le protège, entièrement démuni, entièrement vulnérable, là où l'on voit l'enfance véritable, celle qui est sans plis et sans détours, qui ne dissimule plus rien, celle qui frémit le couteau sous la gorge, celle qui demeure muette devant les boursouflures du savoir ! C'est de vie qu'il s'agit, là où deux mains espèrent se rejoindre, là ou deux êtres comprennent que seule la douceur engendre et qu'elle relie chacun à son visage véritable  ! Monde défiguré par la violence et le bruit, terre étourdie, qui oeuvre pour la mort dans le refus du don et du partage, suivrez-vous encore longtemps l'araignée qui tisse sa toile d'illusions ! Blanche primevères qui ne retiennent rien, naissent et disparaissent sans autre raison que leur splendeur, témoignez de l'unité paisible qui vient quand la faille atroce s'expose enfin à ce qui peut la guérir ! Un frisson vert parcourt les arbres de la colline, les jardins frémissent aux avances du printemps, les bourdons sortent de leur cachette. Les aubépines terminent l'hiver trop doux sous une neige délicate de pétales ! Toute la nature appelle à une amitié secrète, à une connivence de chaque instant, la seule qui vaille, la même que celle qui parfois permet de reconnaître un humain délivré de lui-même, libre, entièrement libre !